Le marché de l’immobilier haut de gamme en 2017 12 Temps min de lireLuxevastgoed

Ne dit-on pas que le Belge a une brique dans le ventre ? Assureur dans l’immobilier haut de gamme, Hiscox a réuni autour de la table quelques courtiers en vue pour débattre des tendances actuelles sur le marché de l’immobilier.

Comment le secteur de l’immobilier haut de gamme se porte-t-il actuellement en Belgique ?


Roel Druyts : On ne peut pas véritablement parler d’un marché immobilier unique à l’échelle du pays. Les différences entre régions sont importantes. Pour notre agence, les dix-huit derniers mois ont pratiquement été les meilleurs de ces quinze dernières années. Nous ne nous plaignons donc pas, mais le haut de gamme reste un marché assez difficile. Les biens immobiliers dépassant le million d’euros s'écoulent bien plus lentement qu'il y a 7 ou 8 ans.


David Chicard : Le marché immobilier belge se différencie des marchés flamand ou wallon. Notre clientèle est constituée d'un peu plus de 50 % de Belges et de quelque 25 % de Français. Le petit quart restant concerne des clients de nationalité suisse, allemande ou autre. Aujourd'hui, la majeure partie de notre clientèle intéressée par des biens de plus de 5 millions d’euros est belge. Auparavant, il s'agissait principalement de clients français, mais ceux-ci décrochent actuellement, pour des raisons fiscales. Le prix de vente moyen de nos immeubles s'établit aujourd'hui à 2,4 millions d’euros. Notons par ailleurs que le segment de marché des biens vendus entre 1 et 3,5 millions d’euros est assez dynamique. Entre 3,5 et 5 millions d’euros, les candidats-acquéreurs ne se pressent guère aux portillons : le marché y prend des airs de « no man's land ». Au-delà des 5 millions d’euros, on relève un certain nombre de ménages à la recherche d'un bien, le Brexit motivant par exemple certains résidents londoniens de longue date à déménager vers Bruxelles.


Roel Druyts : C'est précisément ce que j’ai déjà relevé. Il existe d’énormes disparités entre les régions de notre pays, on ne peut pas généraliser. Ainsi, tandis qu’un bien immobilier dépassant le million d’euros relève déjà du haut de gamme dans le nord du pays, ce n’est absolument pas le cas à Bruxelles.


Michael Deroose : Chaque année, nous calculons le prix moyen de l’immobilier publié sur notre site Internet. Nous avons pu en déduire que l’an dernier, le prix d'achat moyen en Flandre était un peu plus élevé que celui de l'année précédente. À Bruxelles, nous avons cependant observé une diminution des prix de l’ordre de 15 à 20 %. Peut-être les attentats de Zaventem et de la station de métro Maelbeek ont-ils eu un impact à cet égard ?


David Chicard : Cela ne fait aucun doute. Les attentats terroristes ont suscité de nombreuses incertitudes, d'abord en France, puis en Belgique et récemment en Angleterre. Un sentiment nourri également par le Brexit. Et tout cela influence bien entendu le marché de l’immobilier. 


Relève-t-on une différence de clientèle entre régions ?


Michael Deroose : En Flandre, on a plus tendance à acheter un bien immobilier « près du clocher du village », si je peux m’exprimer ainsi.


Bart Christoffels : Cela dépend du prix, je pense. Les biens d'une valeur inférieure à 500.000 euros sont acquis par des personnes de la région. Au-delà de ce montant, les acquéreurs sont surtout intéressés par le logement proprement dit, la localisation importe moins.


Michael Deroose : C'est vrai, dans un certain sens, mais la distance que les personnes sont prêtes à parcourir en Flandre reste limitée. À Bruxelles, le marché de l'immobilier est bien plus tourné vers l'international.


Bart Christoffels : Jusqu’à il y a quelques années, les Néerlandais représentaient environ 80 % de notre clientèle. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 5 %. Nous remarquons toutefois que ce pourcentage repart à la hausse. En effet, le marché de l'immobilier néerlandais est en pleine croissance. À Amsterdam, acquérir un bien n'est possible que si le montant proposé est au moins 10 % supérieur au prix de vente demandé. Rotterdam, Maastricht et Eindhoven se portent bien également. Et les acquéreurs intéressés par l'immobilier dans ces deux dernières villes ne voient aucun inconvénient à prospecter plus loin, quitte par exemple à passer la frontière belge.


Qu’en est-il de l’immobilier à la Côte belge, dans une commune comme Knokke par exemple ?


Frédérique Pauporté : Les agences immobilières de Knokke fonctionnent bien, elles sont très satisfaites.


Bart Christoffels : C'est vrai, mais c'est logique. Il s'agit là d'un petit marché et l'achat d'un bien immobilier à Knokke intéresse tant les candidats-acquéreurs belges que néerlandais et allemands.


Michael Deroose : Knokke constitue en effet un marché très dynamique, compte tenu du nombre élevé d'acquéreurs potentiels que l'on y observe actuellement. Un nombre élevé qui s’explique également par la nature de ce marché, principalement axé sur les secondes résidences. À cet égard, je constate que le critère de la localisation est tout de même crucial. Si une villa est proposée à 5 millions et que, par ailleurs, sa localisation convient parfaitement à un candidat-acquéreur, celui-ci achètera ce bien et le prix sera quelque peu relégué au second plan.


L’offre immobilière est-elle suffisante ?

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Frédérique Pauporté : Oui, tout à fait. De nombreux immeubles sont proposés à la vente. Cela s’explique entre autres par le fait que les Belges aiment acheter et vendre de l’immobilier. Je remarque que la période durant laquelle un bien immobilier reste la propriété d'un ménage ou d'une famille est souvent assez limitée. Certaines évolutions de la vie conduisent parfois les personnes à opter pour un autre logement. Naissance, divorce, déménagement, nouvel emploi… tous ces facteurs peuvent contribuer à une vente plus rapide d'un bien immobilier. De nombreux Belges optent aussi délibérément pour un logement familial relativement modeste, leur permettant de posséder une deuxième voire même une troisième résidence, par exemple, une maison de vacances.


Quelles tendances observez-vous sur le plan de l’immobilier d'investissement ?


Bart Christoffels : Nous pensons que le marché résidentiel a encore quelques belles années devant lui. Mais en termes d'investissements, tous les regards convergent vers les logements avec assistance. Aujourd'hui, les gens se contentent d'un rendement de 3 % et nous pouvons les leur offrir dans ce cadre.


Roel Druyts : Je me demande si, entre-temps, les logements avec assistance n'ont pas déjà atteint leur point culminant.


Relève-t-on une différence entre l’attrait pour la construction neuve et pour les immeubles rénovés ?


Roel Druyts : Si le prix s'établit à 2 millions d’euros, mais on parle bien ici d'une construction neuve, le bien sera vendu. Cette possibilité de conclure une vente est bien plus réduite si le prix est inférieur mais que l'immeuble doit être rénové. Cette situation ne changera que si la demande d'immeubles à rénover vient à augmenter.


Michael Deroose : Les personnes disposant de tels budgets n’ont pas de temps à consacrer au suivi de travaux de transformation ou ne souhaitent pas le prendre, surtout si des biens plus récents et clé sur porte sont disponibles sur le marché.


David Chicard : C'est également notre constat. Les biens de plus de 10 ou 15 ans sont plus difficiles à vendre. Les biens de plus de 20 ans, par exemple, sont souvent démolis, libérant dès lors de l’espace pour de nouvelles constructions.


Bart Christoffels : Ce que nous observons souvent aussi, par exemple à Anvers, c’est que des personnes achètent un immeuble de 4 étages, en font des appartements haut de gamme et les vendent très rapidement pour une coquette somme.


Roel Druyts : C'est vrai. Ajoutons également qu’un marché des secondes résidences se développe à Anvers, où l’on voit par exemple que des appartements sont vendus à des personnes voulant y passer le week-end. C'est un phénomène relativement récent. Bien sûr, cette nouvelle tendance fait grimper la demande et dynamise le marché.


À quels défis vos agences immobilières devront-elle faire face dans les années à venir ?


Frédérique Pauporté : Nous sommes et restons à la recherche de bien immobiliers de qualité qui se vendent relativement vite. Nous avons peu intérêt à garder un même immeuble longtemps en portefeuille et à continuer à en assurer la publicité. Bien entendu, cela pèse également sur la rentabilité.


David Chicard : Le marché est ce qu'il est, on ne pourra pas le changer. Ce que nous faisons, cependant, c’est mettre l’accent sur la qualité dans nos présentations, notre service, notre communication… Je pense qu'il est aussi important que les acquéreurs de biens immobiliers aient conscience du temps nécessaire pour trouver un acquéreur pour des immeubles dépassant le million d’euros. Par ailleurs, il convient de fixer un prix juste dès le début. Ainsi, lancer des prix absurdes revient à hypothéquer ses chances de vente et à concéder en définitive un montant inférieur à la valeur de l'immeuble, ce qui n’est bon pour personne.


Bart Christoffels : Pour nous, le défi consiste à trouver des opportunités. En effet, le marché évolue très rapidement. Au départ, notre rayon d'activité se limitait à la zone frontalière, grâce à notre clientèle néerlandaise. Lorsque ces clients se sont détournés, nous avons porté notre attention sur toute la province du Limbourg … Nous remarquons aujourd'hui que les candidats-acquéreurs néerlandais sont de nouveau plus nombreux. Nous devons donc trancher en fonction des possibilités qui se présentent à nous et réagir de plus en plus vite à des opportunités en pleine évolution.


Michael Deroose : Nous continuons à investir dans les outils de communication modernes : médias sociaux, publicité en ligne (AdWords), magazines, publicités … Il y a trois ans, nous faisions partie des premières plateformes d'immobilier haut de gamme à présenter des immeubles via Facebook. Aujourd’hui, c'est devenu monnaie courante et ça fonctionne très bien. Dans les années à venir, nous miserons fortement sur la publicité mobile, porteuse selon nous.


Quelle est la priorité absolue de vos clients haut de gamme ?


Frédérique Pauporté : Disposer d’un service quasi irréprochable. Les clients « haut de gamme » ont forcément été gâtés par la vie et nourrissent dès lors des attentes élevées. De tels clients souhaitent donc par exemple que nous les aidions à rassembler tous les certificats en matière d'électricité et d'énergie, car c’est le genre de service qu'ils s’attendent à recevoir.


David Chicard : Il y a trois ans, nous recourions à notre photographe attitré pour prendre de belles images d'immeubles haut de gamme mis en vente. Entre-temps, la vidéo a également fait son apparition dans ce domaine. Nous offrons à nos clients un service « 360° », comprenant entre autres un volet « gestion », « investissements », « location et vente », etc.


Bart Christoffels : Ce que les clients veulent avant tout, c'est pouvoir compter sur nous. Ils doivent savoir que nous faisons notre travail comme il se doit et ne veulent pas être confrontés à des problèmes. Et ils sont prêts à mettre le prix pour obtenir ce qu'ils désirent.


Roel Druyts : Nous cherchons sans cesse de nouvelles manières de créer de la valeur ajoutée pour nos clients. Si vous ne le faites pas, vous perdez de votre importance sur le marché.


Dans quelle mesure la sécurité et la protection comptent-elles pour les clients haut de gamme ?


Roel Druyts : J’essaie de ne pas aborder ce sujet lors de nos entretiens, car si vous vous concentrez trop sur des systèmes de sécurisation intelligente, vous suscitez un sentiment d'insécurité et de doute chez le client. Cela fait partie des sujets que l'on ne souhaite pas trop aborder lors d'un entretien de vente d'un logement de luxe.


Frédérique Pauporté : Il est vrai que certains clients nous posent des questions sur la sécurité et les mesures de prévention. Il arrive par exemple que certains ne veuillent pas de jardin, précisément en raison des risques d’effraction.


Les clients s'adressent-ils également à vous pour des conseils en assurance ?


Roel Druyts : Cela arrive, mais pas souvent. Seul un pourcentage très limité de notre chiffre d'affaires « assurances » provient de la vente de biens immobiliers. Dans le sens inverse, les liens directs au départ de l'activité d'assureur sont également rares. Les clients entretiennent chaque année des contacts avec vous. Dès lors, vous êtes indirectement le premier auquel ils pensent lorsqu'ils veulent vendre ou acheter un bien immobilier. Quoi qu'il en soit, l'activité d'assurance permet d’établir une relation de longue durée avec votre clientèle.


Bart Christoffels : Les assurances fonctionnent sur le lien de confiance. Les Néerlandais qui achètent un bien immobilier chez nous contractent souvent leurs assurances auprès de la première personne de contact digne de confiance qu'ils rencontrent. Chez les Belges, c'est différent : ils ont déjà souvent des contacts dans leur vie de tous les jours. Le lien entre l'acquisition d'un bien immobilier et la souscription de leurs assurances est, dès lors, un peu moins fort. Selon moi, il existe une différence majeure entre les courtiers en assurances et les agents immobiliers. Si des clients sont à la recherche de la maison de leurs rêves et que vous possédez ce qu'ils convoitent, ils l'achèteront chez vous, même si le courant ne passe pas si bien entre vous. La situation est différente chez les courtiers en assurances : le lien personnel y occupe une place bien plus importante. Vous pouvez donc proposer le meilleur produit d’assurance, si les clients ne vous font pas confiance, vous ne le vendrez pas.


Quelles sont vos attentes à l’égard des assureurs ?


Bart Christoffels : Que les clients que nous leurs confions reçoivent un service sans failles.


Roel Druyts : En effet, c'est important. Si vous envoyez vos clients chez un assureur, vous voulez que l'aide qu'il y reçoit soit optimale.

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